Après Disabled Theater, pièce portée par une troupe d’acteurs handicapés mentaux et Cour d’honneur, mettant au centre de la scène un groupe de spectateurs, la nouvelle création de Jérôme Bel repart d’une même question de départ : comment faire entrer dans le champ de la représentation des individus et des corps qui en sont le plus souvent exclus ? Utiliser toutes les ressources de cet appareil unique, le théâtre – avec ses codes, ses lieux, ses genres, ses professionnels – pour élargir le périmètre de ce qu’il peut montrer, et en (re)faire un outil démocratique dont chacun puisse se saisir à partir de son désir de danse, de chant, de spectacle ? Jérôme Bel est parti ici du plus « commun » de l’expérience théâtrale : le gala, ce moment festif et collectif, renvoyant aussi bien aux spectacles de fin d’année qu’aux pièces d’amateurs. Il l’a détourné afin de parcourir des styles, des fragments d’histoire, et dresser l’inventaire d’une danse « sans qualités », révélant autant de rapports singuliers au mouvement et à la voix. Qu’est‑ce qui fait que l’on danse ? Comment regarder une danse parfois fragile, précaire, tout en évacuant la notion de jugement, de « bien fait », de « mal fait » ? Le résultat est un gala troué, rapiécé, traversé par des moments réflexifs, des galeries de portraits actualisés à chaque étape. Mélangeant professionnels et amateurs, n’hésitant pas à « rater encore », à « rater mieux », Gala sillonne les théâtres comme un « miroir qui se promène le long d’une route », et renvoie chacun à la fabrique des sujets tout autant qu’à celle des regards.
Gilles Amalvi, pour le Festival d’Automne à Paris
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