Dans cette création intitulée Violences, la metteuse en scène Léa Drouet tente de passer de l’autre côté des gros titres de l’actualité. Avec son écriture sensible, elle avance sur le bord des images de violence telles qu’elles sont agencées pour nous choquer. Par leur pouvoir de sidération, ces images nous empêchent d’agir et de sentir. Résister à cette assignation à la passivité commence peut-être par éprouver et expérimenter.
Seule en scène, l’artiste suit ainsi le parcours de sa grand-mère Mado qui, enfant, dut traverser le pays pour échapper à la rafle du Vél’ d’Hiv’. Sur la route des exils forcés, Léa Drouet rencontre une autre petite fille dont le voyage a avorté et que l’actuel monde des frontières a tuée. Dans les interstices qui séparent les morts que l’on compte de toutes les morts qui ne comptent pas, la pièce tente de recomposer des mémoires ainsi que des histoires pour l’avenir. Léa Drouet agit sur un espace principalement composé de sables, évoquant des territoires fracturés, des frontières. Si le sable sait parfaitement recouvrir les traces et effacer les marques de violence, il est aussi porteur d’empreintes. L’artiste façonne ce paysage où le corps engagé passe du témoin à l’actrice et de l’actrice à la narratrice.
Peu à peu émergent d’autres positions, d’autres possibilités d’action et d’autres attentions au détail. Car c’est peut-être dans la fragilité des grains de sable que se distinguent les fondements, friables et solides à la fois, d’un monde capable d’assumer ses conflits autrement que sous la forme du champ de bataille et de l’État de guerre généralisé.
Léa Drouet est une metteuse en scène française. Diplômée de l’Institut national supérieur des arts de la scène de Bruxelles, elle est installée à Bruxelles depuis 2010. Son travail circule entre l’installation, le théâtre et la performance. Proche de la scène musicale expérimentale bruxelloise, elle s’entoure aussi d’artistes au croisement de plusieurs pratiques: acteurs, danseurs, performeurs, plasticiens, musiciens.
Elle crée 0& en 2012 rassemblant vingt performeurs pour un concert de magnétophones à cassettes. Plusieurs versions de cette choralité spatialisée seront déclinées au Kunstenfestivaldesarts dans la gare de Bruxelles-Congrès (Derailment, 2015) ou au Palais de Tokyo pour l’événement Indiscipline (Tape ensemble, 2016). Mais dans les lieux du péril croît aussi ce qui sauve est présenté au skatepark des Brigittines dans le cadre du Kunstenfestivaldesarts en 2016. À Athènes, dans le cadre de la Nuit de l’esthétique (mai 2017), elle présente une installation performance intitulée Squiggle. Nanterre-Amandiers l’a accueillie en 2018 avec sa dernière création Boundary Games. Depuis juin 2020, Léa Drouet est la nouvelle coordinatrice artistique théâtre de l’Atelier 210 à Bruxelles.
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