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Dans la pharmacie de Christoph Marthaler, les médicaments se rebiffent, s’échappent de leurs tiroirs. Les blouses blanches ont le blues. Mises en garde et effets secondaires sont de rigueur. La dernière création du metteur en scène suisse est une ode à la mycose des ongles, un soap-opéra des intestins…
Jésus portant la croix. Mais pas n’importe quelle croix. Celle-ci est d’un vert-pharmacie fluorescent qui clignote au rythme des battements d’un cœur invisible. Dans la boutique, les pharmaciennes trinquent aux médicaments « dé-rangés » et aux malades imaginaires, sur des airs de marche funèbre. Ce n’est pas la pandémie qui a inspiré Marthaler mais un effet secondaire provoqué par un antibiotique censé le guérir d’un premier mal. « Il n’y a plus d’effets, il n’existe plus que des effets secondaires » se dit-il et cela lui rappela les gestes et frasques artistiques de son ami Dieter Roth, sculpteur-poète dont l’œuvre iconoclaste et en perpétuel mouvement oscillait entre provocation et prise de conscience. Roth avait offert à Marthaler un exemplaire de son livre Das Weinen. Das Wähnen (Tränenmeer 4). Marthaler y a toujours pioché des éléments disparates pour ses créations. « Rien n’est plus important qu’écrire ou plutôt ruminer. Former des phrases » écrit Roth. La conception périssable de l’art et la matière, selon Roth, trouve un écho dans les mises en scène « en-chantées » de Marthaler, sculpteur du vide abyssal du monde actuel et du non-sens. Derrière son ironie grinçante, on entend la mélodie de la mélancolie.
Né en 1951 à Erlenbach dans le canton de Zurich (Suisse), Christoph Marthaler étudie la flûte et le hautbois. Il suit pendant deux ans des cours de théâtre à l’école de Jacques Lecocq à Paris. D’abord musicien, ses premières incursions dans l’univers du théâtre se font par le biais de performances d’inspiration dadaïstes inspirées de Kurt Schwitters ou d’Erik Satie. À Bâle à la fin des années 1980, Christoph Marthaler commence à monter des spectacles dans un cadre plus traditionnel comme L’affaire de la rue de Lourcine, d’Eugène Labiche (1991) ou Faust. Une tragédie subjective d’après Fernando Pessoa (1992). En 1993 il monte à la Volksbühne à Berlin Murx den Europäer ! Murx ihn ! Murx ihn ! Murx ihn ab ! (Bousille l’Européen ! Bousille-le ! Bousille-le ! Bousille-le bien !). Mêlant indissociablement sens de l’humour et une profonde sensibilité musicale, son théâtre est indissociable d’une réflexion sur la mémoire historique. En 2014, il présentait King Size au Théâtre Nanterre Amandiers.
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